Nous sommes tous des Arabes Tunisiens !

En écho aux étudiants de Mai 1968 qui défilaient en scandant « Nous sommes tous des juifs Allemands ! » après l’arrestation de Daniel Cohn-Bendit, nous devons affirmer aujourd’hui notre solidarité avec les jeunes tunisiens et, plus important, apprendre d’eux comment résister à la résignation sécuritaire et à l’injustice économique.

  • Leçon tunisienne n°1 : Pauvreté, jeunesse et injustice forment un coktail explosif

La première leçon à retenir de la révolution tunisienne nous vient de Sidi-Bouzid, point de départ de la révolte tunisienne. Comme on peut le voir dans l’analyse détaillée de la crise tunisienne qui a été publiée par le CIST (Une cartographie géomédiatique de la crise tunisienne) et par le journal Libération (Tunisie, une révolution en marche), le point de départ de la révolution tunisienne se situe dans les trois régions de Kasserine, Kairouan et Sidi Bouzid qui ont comme points communs :

  • Une très forte proportion de jeunes de 15 à 25 ans.
  • Un fort taux de chômage et de faibles revenus.
  • Un sous-équipement en matière de services publics.

Intéressant, non ? Puisque voici précisément le portrait robot de ce que nos gouvernants et leurs amis journalistes formés à Science Po appellent les « Banlieues » ou les « Cités ». Lorsque l’on examine les données sociales et économiques des quartiers du Val de Marne (Cf. Atlas du Haut Val de Marne), on retrouve des écarts qui sont comparables à ceux observés entre régions tunisiennes. Or, on ne doit pas oublier que  jeunesse, pauvreté et injustice forment un cocktail explosif qui peut être le point de départ des révolutions.

Pour plus de détail, Cf. Article du Blog EELV Sucy-en-Brie : Une typologie socio économique des quartiers du Val de Marne

  • Leçon tunisienne n°2 : Une dérive sécuritaire organisée au profit des privilégiés du régime

La seconde leçon qui nous vient de Tunisie est le caractère illusoire et finalement fragile des dispositifs totalitaires de surveillance des populations, qu’ils soient fondés sur la répression policière, le contrôle de la presse ou l’intimidation des gêneurs.   A l’heure où les communes françaises se couvrent de caméras de vidéo-surveillance et où l’état UMP multiplie les annonces sécuritaires, au point de remettre en cause les fondements de la république, la révolution tunisienne apporte un peu d’air frais et disperse les relents nauséabonds de la politique de répression sécuritaire de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux et Eric Besson.

Ce que nous apprend la Tunisie, c’est tout d’abord le lien étroit qui existe entre l’importance du dispositif sécuritaire et le développement de la corruption et du népotisme  à la tête de l’État. Plus la politique menée apparaît injuste et de nature à servir uniquement les intérêts d’un petit clan de privilégiés, plus il est nécessaire d’alourdir le dispositif répressif et sécuritaire et de développer, au delà des formes normales d’autorité (Police, Armée) des milices privées ou des services secrets parallèles.

 

Territoires de refuge des privilégiés du régime et zones de spéculation effrénée : Carthage-Le Lac-Sidi Bousaïd                            Neuilly-Auteuil-Passy

A nouveau, le parallèle s’imp ose avec une France qui a vu exploser parall éleme nt les inégalités sociales et les sociétés de sécurité ou de vidéo surveillance. Sans parler de ces communautés de privilégiés qui se regroupent géographiquement pour mieux se protéger et éviter de croiser le regard des victimes de leur injustice. Le triangle Neuilly-Auteuil-Passy, n’est pas sans rappeler le triangle Carthage-Sidi-Bouzid-Le Lac …

  • Leçon tunisienne n°3 : L’alliance des intellectuels et des prolétaires, des politiques et des associatifs

La troisième leçon de la révolution tunisienne, sans doute la plus importante pour un mouvement politique expérimental comme Europe-Ecologie/ Les Verts, c’est la réalisation improbable et pourtant combien riche et efficace d’une alliance entre les prolétaires de l’intérieur et les intellectuels de la côte, les militants syndicalistes et politiques des bastions ouvriers et ceux des associations de droit de l’homme ou d’environnement.

L’histoire n’est certes pas encore terminé et, dans la Tunisie de 2010 comme dans la France de 1789, on peut toujours craindre qu’une révolution d’origine populaire soit finalement confisquée par une bourgeoisie ambitieuse ou une élite technocratique … Ce n’est pas par hasard si les habitants de Sidi Bouzid ou de Kasserine sont « montés à Tunis » dans les jours qui ont suivi le renversement du régime Ben Ali pour défendre « leur » révolution et s’assurer que les bénéfices en seraient partagés équitablement par tous.

Il n’en demeure pas moins vrai que la révolution tunisienne a été une œuvre partagée où les étudiants des villes côtières ont repris et amplifié grâce à toutes les ressources d’internet et de la blogosphère le mot d’ordre lancé par leurs frères moins fortunés des villes de l’intérieur. Il est vrai également que, sans la mobilisation du syndicat tunisien UGTT, moins inféodé qu’on aurait pu le croire au parti au pouvoir, la mobilisation ne se serait pas propagée aussi rapidement aux villes ouvrières de Gasfa et  Bizerte ou aux grandes métropoles de Sfax, Sousse et Tunis.

Et on aura garde enfin d’oublier l’action de toutes les associations durement réprimées sous le régime Ben Ali de défense des droits de l’homme et de l’environnement, pour ne citer que celles-ci. Car le tourisme en Tunisie n’est pas seulement une industrie hautement rentable, c’est aussi un facteur de dégradation des milieux (bétonnage de la côte, épuisement des ressources en eau de l’oasis de Tozeur) et un mode de développement à bien des égards injuste (confisqué par les plus riches et les membres du clan au pouvoir) et surtout non durable.

Le golf de Tozeur : un scandale absolu dans une région aride où la nappe phréatique est en voie d’épuisement

 

  • Conclusion : Indignons nous !

La Tunisie nous apprend finalement que le principale danger qui menace la société française est la résignation et le repli sur soi. Au nom d’une supposée menace islamiste, on a justifié pendant des années l’injustifiable et soutenu au sud de la Méditerranée des régimes corrompus et brutaux. Il est temps de retourner le miroir et d’observer la sombre  fin de règne de Nicolas Sarkozy à la lumière de la révolution de Jasmin.

Qu’attendons nous pour suivre l’exemple de la Tunisie ?

Claude Grasland

Militant Europe-Ecologie/ Les Verts (Sucy-en-Brie)

 

Publié par Claude Grasland

Co-secrétaire du groupe local EELV "Vallée du Morbras"

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